— Par Maurice KAYA-BOUNGOU, Président de l’AECF de 2021 à 2023.
Le 06 septembre 2017, j’arrive en France en provenance de la République du Congo. Des rêves pleins la tête, des conseils de toute la famille qui y résonnent encore (dans ma tête).
Pour les amis, tu es un exemple alors que pour les parents tu es une fierté, l’espoir de la famille :
“Mon fils, il faut montrer à ces blancs que tu es intelligent”
Mère et père
“Petit toujours likolo, mindélé yina faut ba zaba”.
Un grand frère
Pour s’assurer qu’ils peuvent toujours compter sur toi, les amis, la famille t’appellent régulièrement afin de connaître ton classement dans la promo. Leur attente ? Tu la connais déjà : montrer que tu es le meilleur ou faire partie des meilleurs”.
Pendant mes deux premières années en France, je me suis battu pour atteindre cet objectif. Je me devais aussi de prouver à mon entourage majoritairement blanc, que le noir était intelligent. Ce poids, cette charge mentale, beaucoup d’autres étudiants le portent. Nous sommes des “étudiants en mission”.
Mais aujourd’hui avec un peu plus de recul, je me rends compte que nos parents, nos ami.e.s se sont trompé.e.s de mission. Ils se trompent de combat. Les choses sont différentes ici, et cela est d’autant plus difficile quand nous devons répondre aux attentes qui n’ont pas lieu d’être.
Chers ami.e.s, chers parents, vouloir prouver aux autres, et aux blancs en l’occurrence que les noirs sont aussi intelligents qu’eux est une aliénation. Briller, tout simplement parce que l’on doit être meilleur que les autres est une aliénation, et une perte d’énergie.
Une chose que j’ai comprise : nous ne sortirons pas le blanc de son complexe de supériorité en lui montrant que nous sommes capables de… ou en étant meilleur dans sa promo. Nous ne sortirons encore moins les noirs de leur complexe d’infériorité en jouant au super intello.
Aujourd’hui, un frère m’a dit “nous devons donner le meilleur de nous-même chaque jour pour impacter nos communautés”. Voilà le bon combat.
Quand les intentions sont bonnes, les actes inspirent et marquent les esprits. D’ailleurs, cela constitue une saine motivation et on ne se nuit pas mentalement.
Gardons de près notre objectif. Définissons nous-mêmes notre réussite.
Soyons prêts à accepter nos échecs, à redéfinir nos projets, à repartir de zéro sans être bloqué par la pression familiale ou celle de notre entourage.
En tant qu’étudiant, notre objectif premier est sans doute de réussir nos études mais faisons-le sans être trop dur avec nous-mêmes. Pour beaucoup nous devons nous-mêmes subvenir à nos besoins, confronter les réalités de la vie, tenir bon face à différentes éventualités loin de la famille, dans un pays étranger. Il y a trop de paramètres qui rentrent en jeu. Alors ne laisse personne te rajouter une vaine charge mentale.
J’ai écrit sans pression, à toi de vivre sans pression, loin de la dépression.
— Maurice K3M —